HISTOIRE DES COLONIES FRANÇAISES
très vite. En 750, les Ommiades de Damas disparaissent pour faire place aux Abbassides, qui, quelques années plus tard, se fixent à Bagdad. L'Espagne, de son côté, oppose au khalifat d'Orient celui de Cordoue. Quant aux Berbères, ils se débarrassent, eux aussi, de l'autorité politique que l'Orient leur avait imposée. Les Kharedjites fondent deux royaumes dans le Maghreb, l'un à Tiaret, l'autre à Sidjilmassa au Tafilelt. Tiaret, créée par un Persan, Abd-er-Rahmanben-Rostem, fut, de 761 à 9o8, la métropole du kharedjisme berbère; le chef, en principe librement élu, ne portait d'autre titre que celui d'imam, directeur de la prière; il disposait d'une arme redoutable, l'excommunication, mais était luimême surveillé par les clercs et les théologiens qui l'entouraient. Les sciences religieuses étaient étudiées avec ardeur, le commerce était florissant : « On faisait à Tiaret, dit G. Marçais, à la fois de bonnes affaires et beaucoup de théologie. » C'est un trait qui s'est conservé chez les Mozabites, derniers héritiers des Kharedjites. Fatigué du Maghreb, le khalife Haroun-er-Rechid le donna en fief à la famille des Aghlebites, qui, de 800 à 908, se perpétua dans ce commandement. Les émirs aghlebites reconnaissaient la suzeraineté de Bagdad, mais jouissaient en fait d'une indépendance absolue. Ils réalisèrent dans l'Ifrikia une pacification relative, mais ne réussirent ni à reprendre les provinces de l'Ouest, où les Idrissites, descendants d'Ali, venaient de fonder le royaume de Fès, ni à détruire les principautés de Tiaret et de Sidjilmassa où se maintenait le kharedjisme. |
Déjà une nouvelle secte, celle des Fatimites Chiites, faisait son apparition dans l'Est de la Berbérie. Descendants du Prophète par sa fille Fatima, épouse d'Ali, les Fatimites étaient considérés par leurs partisans comme les seuls souverains légitimes. Les Berbères, qui avaient si bien accueilli les tendances puritaines représentées par les Kharedjites, accueillirent également bien les tendances mystiques représentées par les Chiites. La secte nouvelle fut d'autant mieux reçue qu'elle se présentait comme ennemie de l'orthodoxie et des khalifes. Le mahdi Obeïd-Allah trouva un appui chez les Ketama, qui habitaient la région montagneuse et difficile comprise entre Constantine et Bougie, dans la Kabylie des Babors. Il fut bientôt reconnu dans tout le Maghreb et l'Ifrikia ; les Aghlebites furent chassés de leur capitale, le royaume de Sidjilmassa détruit, Tiaret livré aux flammes. Les Fatimites choisirent comme capitale Mahedia, l'Africa des écrivains chrétiens du Moyen Age, qui devint le point de départ de leurs expéditions navales et leur refuge contre les soulèvements des indigènes. |